Amnesty International (AI) a publié en janvier 2022 un rapport intitulé "L’apartheid israélien envers le peuple Palestinien : un système cruel de domination et un crime contre l'humanité". Ce rapport est inhabituellement critique envers le régime sioniste, accusé de « ségrégation territoriale et restrictions de déplacement, saisies massives de biens fonciers et immobiliers, expulsions forcées, détentions arbitraires, tortures, homicides illégaux ... » [Présentation - Résumé - Rapport (eng)].
N.B. Rappelons, encore et toujours, que le régime sioniste – qui usurpe le nom d'Israël depuis 1947 – ne représente ni les juifs, ni le judaïsme. Ainsi de nombreux juifs, laïques ou orthodoxes, sont farouchement antisionistes.
Des femmes bédouines assises à côté des ruines de leurs maisons, à Umm Al-Hiran, déser du Négec, Israël © Faiz Abu Rmeleh.
Vingt cinq ans plus tôt, Alain Dieckhoff, directeur de recherche au CNRS et spécialisé dans la politique et la société contemporaine d’Israël, décrivait le régime israélien comme une « ethno-démocratie » c-à-d une démocratie limitée aux juifs (du moins les juifs sionistes).
Dieckhoff démontre que le régime sioniste est bien fondé sur le colonialisme et son inéluctable apartheid : « Officiellement l'égalité entre les citoyens israéliens, juifs et arabes, est donc préservée par l'État puisque les avantages spécifiques dont les Juifs bénéficient leur sont attribués par des institutions transnationales. Pourtant, dans certains cas, l'État lui-même fait prévaloir la logique communautaire sur l'appartenance citoyenne. Celle-ci ne fut ainsi d'aucune utilité pour protéger ses détenteurs arabes contre les lois foncières votées au cours des années 1950 qui avaient pour objectif d'exproprier le maximum de terres arabes privées pour accroître l'emprise territoriale de l'État d'Israël et consolider sa souveraineté politique. L'État a clairement considéré "ses Arabes", non comme des citoyens israéliens dont il fallait respecter les droits, mais comme des Arabes palestiniens, membres d'un groupe ethnico-national qu'il convenait de transformer en minorité sous contrôle.
Cette discrimination structurelle pratiquée par l'État est en général plus voilée qu'explicite. Ainsi les zones défavorisées auxquelles l'État verse des subventions spécifiques pour encourager le développement économique sont-elles dessinées de telle sorte qu'elles n'incluent aucun village arabe. De même, les fonds gouvernementaux alloués aux municipalités sont-ils proportionnellement plus élevés pour les villes juives que pour leurs homologues arabes » [source, 1996].
L'analyse des faits historiques révèle une forte propension d'AI à "justifier" les agressions atlantistes contre des gouvernements anti-impérialistes (ce fut notamment le cas avec la Yougoslavie dans les années 1990, ou encore la Jamahiriya arabe libyenne et la Syrie en 2011), et d'autre part à minimiser la réalité du régime colonialiste et d'apartheid qu'est Israël.
AI n'est qu'un parmi de nombreux autres vecteurs de propagande sioniste, comme par exemple le Concours Eurovision de la chanson, dont un des pays participants est ... Israël, ce qui participe évidemment à la normalisation culturelle du régime sioniste.
Par conséquent, le changement d'intonation que suggère ce rapport d'AI suscite un questionnement : est-il du au changement de secrétaire générale d'AI en mars 2021 [source], ou plus fondamentalement, le signe de bouleversements géopolitiques majeurs ?
Pour répondre à cette question, commençons par constater que les conclusions propositionnelles d'AI évitent à nouveau de souligner l'impossibilité logique pour tout régime colonialiste de ne pas :
Cette forme de négationnisme – sous couvert de sens critique apparent – permet à l'ONG atlantiste de ne pas devoir en conclure que la solution rationnelle est la dissolution d'Israël, et l'intégration de l'ex-population israélienne dans la Palestine de 1947.
Cependant la conscience des deux points ci-dessus commence à se former au sein même de la population israélienne [source], de sorte que le sabordage du régime sioniste par les israéliens est une voie possible vers la "solution à un État", dont la Constitution stipulerait que la citoyenneté est indépendante des convictions ethnico-religieuses.
Escroquerie de la "solution à deux États". Certes, les sionistes sont généralement opposés à la "solution à deux États", car leur objectif est d'étendre la colonisation. Mais elle n'est pas pour autant la solution pour résoudre le "conflit israélo-palestinien" (*), puisqu'elle revient implicitement à valider le fait colonialiste [voir à cet égard les travaux de la sociologue Christine Pirinoli : journals.openedition.org/etudesrurales/8132, § 76, 2005].
(*) L'expression "conflit israélo-palestinien" trahit un parti pris en faveur d'Israël, car elle revient à égaliser les responsabilités des occupants et des occupés, et à nier cette distinction. As-ton jamais parlé de "conflit germano-français" pour décrire l'occupation de la France par l'armée allemande durant la seconde guerre mondiale ?
La "solution à deux États" est donc contraire à l'esprit du droit international. La seule solution rationnelle pour toute la région entre la Méditerranée et le Jourdain (c-à-d sur la Palestine de 1947) consiste en un État unique laïc et entièrement démocratique [approfondir].Notons enfin que le 30 décembre 2022, un spectaculaire renversement s'est produit à l’Assemblée générale des Nations unies, qui a adopté une résolution demandant à la Cour internationale de Justice, le tribunal interne de l’Onu, de juger l’occupation israélienne de la Palestine (qui dure depuis ... 75 ans) [source].
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Une publication de François Jortay